Les pouvoirs des dirigeants sociaux : limites et sanctions

jeudi 16 juin 2022

Les dirigeants sociaux, nommés par les associés, ont les pouvoirs de conduire les affaires de la société, et par conséquent, d’accomplir une multitude d’actes qui sont passés au nom de la société et qui engagent cette dernière à l’égard des tiers.


Toutefois, il existe des limites aux pouvoirs des dirigeants. Ainsi, certains actes peuvent être constitutifs de fautes de gestion, lesquelles sont susceptibles d’engager la responsabilité du dirigeant à l’égard de la société voire des associés.


Se pose alors la question de savoir si les actes passés par les dirigeants, bien qu’excédant leurs pouvoirs, engagent en toute hypothèse la société, ou si au contraire cette dernière et/ou les associés peuvent obtenir des juges du fond que ces actes soient privés d’efficacité.

Les actes des organes sociaux doivent être conformes à l’intérêt social

L’article 1833 alinéa 2 du Code civil dispose que « La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ».


Les actes en cause doivent donc être utiles à la société et avoir été pris de manière opportune. Il doit être précisé que l’intérêt social ne se confond naturellement pas avec les intérêts de chaque associé. Le dirigeant n’a pas à faire primer ces intérêts individuels sur l’intérêt social.

Les actes des organes sociaux doivent être conformes à l’objet social

L’objet social inclut naturellement les actes de gestion courante (comme les achats et ventes quotidiens relevant de l’activité normale de la société, le recrutement de salariés ou leur licenciement, les opérations courantes de crédit, le paiement des dettes).


Pour certains actes plus importants pour la vie de la société, telles les cessions d’actifs (immeuble, participation dans une autre société par exemple) ou l’octroi de sûretés (hypothécaires notamment), il conviendra de se référer aux termes précis de l’objet social afin de déterminer si l’acte litigieux excède voire épuise l’objet social et s’il implique en conséquence d’être pris par la collectivité des associés réunie en assemblée générale. Pour trancher ce point, la jurisprudence a tendance à faire primer l’objet social effectif de la société lorsqu’il est plus large que celui stipulé dans les statuts.


Les actes des organes sociaux ne doivent pas impliquer la modification des statuts de la société


La modification des statuts ressort de la compétence des associés réunis en assemblée générale. Par exemple, un dirigeant ne peut valablement effectuer un acte qui impliquerait la modification de l’objet social.

Les pouvoirs des organes sociaux peuvent être limités par une convention ou par les statuts


Les clauses limitatives de pouvoirs peuvent être variées. Généralement, elles prévoient la nécessité d’obtenir l’autorisation préalable des associés, du conseil d’administration ou du conseil de surveillance.


A titre d’exemple, elles peuvent prévoir que les licenciements des salariés de la société soient préalablement autorisés par les associés.


Une pluralité de sanctions contre les actes passés par des organes sociaux excédant leurs pouvoirs


Dans la majorité des hypothèses, la sanction classique est la nullité de l’acte litigieux.


Toutefois, la loi prévoit, dans certaines situations, que l’acte litigieux reste valable mais que le dirigeant à l’origine de cet acte engage sa responsabilité civile. La société et/ou ses associés peuvent alors solliciter en justice la condamnation du dirigeant au paiement de dommages et intérêts à leur profit.


De même que la Cour de cassation juge de manière constante que les clauses limitatives des pouvoirs des dirigeants ne sont pas opposables aux tiers. La société et/ou ses associés ne peuvent donc pas obtenir des tribunaux l’annulation des actes qui méconnaissent les termes de ces clauses.


Il ressort de dispositions légales ou de la jurisprudence que la société dont le dirigeant a excédé ses pouvoirs ne pourra pas toujours faire annuler l’acte litigieux. La société devra alors se contenter de demander judiciairement la condamnation de son dirigeant à lui payer des dommages et intérêts.

Cette solution permet de protéger les intérêts des tiers qui, de bonne foi, ont contracté avec la société et pour qui l’annulation de l’acte litigieux serait dommageable.